Témoignage de HAROLD M

Passé 5ng/l, l’urologue à Tarbes déclenche la biopsie. Et c’est l’annonce, un jour de beau temps de juin, je suis sur la liste des passagers : 1 carottage sur 12 positif, sur un millimètre, c’est pas grand-chose. Le message dicté sur le dictaphone et le champ lexical utilisé ne laisse que peu de doutes, j’ai bien mon billet pour un tour d’adénocarcinome de la prostate.
Mon grand père c’était à 70 ans, mon père à 60 ans, moi à 50 ans…

J’apprends aussi que j’ai une prostate, organe ou glande que j’avais sous-estimé, à laquelle je n’avais porté aucuns soins particuliers, ni aucune attention. J’apprends aussi que rien dans mes habitudes de vie n’aurait changé le diagnostic rendu. Les remords en moins.

Vu le peu d’activité tumorale, j’apprends la gradation du score de Gleasom : 6, et le peu de tissu lésé, une surveillance active commence.

Un an plus tard, 2ème biopsie au vu du PSA qui ne cesse de fluctuer. C’est 6 carottages sur 12 positifs, sur les 2 lobes et certains sur 3 mm.

Fin de la surveillance active et 2ème annonce : en ce qui me concerne et vu mon jeune âge (tout relatif !!!), c’est sans autres alternatives possibles l’opération, l’exérèse on appelle ça, l’ablation en gros de la prostate. Bien sûr j’ai eu un an pour lire, en français et en anglais, des abstracts de médecine, des témoignages, des procédés opératoires, nombreux, différents, des techniques schématiquement au nombre de 3, des pages de marketing sur le robot Da Vinci. Tout cela me fait horreur, me fait fuir, me hante jour et nuit. Car l’opération en elle-même n’est rien. Bien maitrisée, retour à la maison dans la semaine, pas de régime particulier. Mais perte de totale de la virilité et risque d’incontinence urinaire important. S’imaginer perdre sa virilité est inconcevable pour un homme, tout du moins pour moi. Même pas dans le pire de mes cauchemars. Quant à porter des couches à 50 ans, c’est difficile à concevoir.

Surtout que ce cancer est totalement silencieux. Je me prépare dans le même temps que ces interrogations, examens de toutes sortes, au marathon de Jersey. J’ai une pêche d’enfer, je le courrai d’ailleurs à plus de 12km/h de moyenne, c’est dire. Avec ma prostate en chou-fleur…

Je décide donc de me tourner vers les alternatives, déconseillées pour moi par tous ceux du corps médical que j’ai croisé. Tous ont été unanimes : prostatectomie totale. Les ultra-sons ? Pas possible. La thérapie focale, j’appelle Angers, encore non, les conditions d’éligibilité sont très restrictives pour la thérapie focale. La cryothérapie, palliative, la chimiothérapie idem, je n’en suis pas là. Reste la curiethérapie qui m’apparait comme un rayon de soleil.

L’urologue à Tarbes me dirige vers l’Oncopôle de Toulouse pour juger de mon éligibilité à la curiethérapie.

IRM, 3 ème biopsie, Kéolis, 3 mois d’attente. Et cette fois-ci encore c’est un refus : la prostate est trop envahie. Douche écossaise. 20 mois que je suis dans ce voyage infernal et je repasse par la case zéro. Pas avancé d’un cil et même plutôt reculé.

J’annule mon week-end à venir et le passe devant l’ordinateur à compulser de nouveaux articles, des techniques, des cas, des évolutions, des moyens d’investigations…

C’est là que je croise le site du Dr Barré sur lequel je m’arrête longuement, y reviens, reviens encore. Le site est rassurant, on sent la maîtrise du sujet. Pas de poudres aux yeux, des articles rédigés non jargonneux, et un côté frondeur qui n’est pas pour me déplaire. Tout y est décrit, expliqué, avec humanité, calme et sérénité. Nicolas Boileau disait : » Ce qui se conçoit bien, s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément », c’est cela le site du Dr Barré. Un site pour tous les éclopés de la prostate, une lettre ouverte, un vademaecum sur lequel on revient, truffé d’informations, toujours pertinentes, rassurantes.

Je trouve dans le même week-end une nouvelle technique de radiothérapie ciblée et apparemment très efficace en première instance, la radiothérapie stéréotaxique.

Dès le lundi j’appelle le secrétariat du Dr Barré, il n’exerce plus. Les coordonnées du Dr Thoulouzan à Toulouse près de chez moi sont indiqués. Je prends rendez-vous avec le Dr Thoulouzan, envoie la liasse de documents nécessaire à une pré-analyse.

Et dans le même temps, je prends rendez-vous avec le service de radiothérapie oncologique de l’hôpital fédéral de Lausanne pour la stéréotaxie.

3 semaines plus tard, je rencontre le Dr Thoulouzan à l’Hôpital de Rangueil le matin et prends l’avion pour Genève l’après-midi.

La Dr Thoulouzan me dit de manière très directe, simplement et rapidement qu’aux vus des pièces fournies (IRM, biopsies, historique complet), qu’il n’y a aucun soucis pour lui à conserver les 2 fascias de nerfs érectiles et que d’après le questionnaire rempli en salle d’attente, je n’ai aucun soucis à me faire avec le retour de ma virilité.

Ca me laisse perplexe. A Tarbes, c’était, à un stade moins avancé de la maladie l’impossibilité totale, sans discuter de récupérer la fonction érectile. Et là, aucuns soucis. Je savais déjà que les techniques d’intervention sont au nombre de 3. Et que 2 d’entre elles devaient être bannies : la laparascopie et la robotique.

A Lausanne, on me demande si je suis joueur. Oui, enfin oui pourquoi ? Car la radiothérapie stéréotaxique, ça peut marcher mais comme dit, c’est un fusil à un coup. Si ça ne marche pas, il n’y a pas d’autres alternatives. Bon, je continue quand même à m’entêter.

C’est quelques mois plus tard lors de l’appel du chirurgien urologue de Lausanne pour la pose d’un anneau gastrique avant irradiation que je décide définitivement que je vais me faire opérer, que je puis enfin prêt pour la prostatectomie. Long parcours.

L’anneau gastrique doit être posé en cas d’irradiation de la prostate car les risque d’incontinences annales sont non négligeables…. Je remercie d’ailleurs ce chirurgien urologue de Lausanne d’avoir pris tout le temps nécessaire pour m’expliquer et me dissuader de cette méthode qui aurait été un échec.

Nous sommes au mois de juin, 24 mois après l’annonce de mon cancer. Je décide que je me ferai opérer lorsque les PSA passeront les 10 ng/l. J’étais à 8.6 en mai.

Je pars en vacances en Corse en famille passe mon été, et puis c’est l’heure de la prise de sang fin août, cette anxiété que tout malade connait. 10.2 ng/l.

Je laisse passer 2 jours et reprends rendez-vous avec le Dr Thoulouzan. C’est rapide. Date de l’opération fixé au 17 novembre 2020. Rien à signaler. Merci. Au revoir.

Secrétariat exceptionnel, je suis suivi, entouré, appelé, des voix féminines réconfortantes, je ne suis pas laissé à mon pauvre sort.



J’arrive la veille, me retrouve dans un couloir à l’étage d’urologie en plein mois de novembre, en pleine forme, et l’idée me travers de m’enfuir. De partir. Aller se faire esquinter comme ça alors que l’on a aucuns symptômes ? Ca n’a pas de sens. Je suis vite pris en charge.

Rasage cycliste le soir, c’est là que l’on prend réellement conscience que l’on va prendre un avis de grand frais…. Que ça va souffler et qu’il va falloir tenir ses voiles dans le gros temps.

L’opération se passe bien, une belle cicatrice horizontale, dans le maillot. Retour en chambre. Des douleurs certes. Qui pour ma part dureront 9 jours. Des belles douleurs. Que je calme au paracétamol, la codéine ça endort le transit intestinal.

Poche urinaire, 1 semaine, c’est ce qui m’a le plus affecté.

Pour le reste. Je récupère relativement vite une continence parfaite. Je passe cependant par les couches pendant plusieurs semaines. Et par la peur que la continence ne revienne jamais. Un grand merci à M. Gagliolo, le kiné génial. D’une gentillesse extraordinaire, il me laisse son numéro de portable, je peux l’appeler quand je veux.

Quand aux érections, un mois jour pour jour après l’opération, je ressens un signal nerveux très faible casi imperceptible dans la partie virile. Sans médicaments. C’est la preuve pour moi que la liaison nerveuse n’est pas rompue. Et une grande joie qui m'envahit

Début du Cialis en 5mg 2 mois après l’opération. Les progrès sont lents mais constants. C’est une fête que de retrouver ce que l’on a pu penser perdre définitivement durant le premier mois après l’opération.

Il me faut 10 mois pour récupérer une fonction sexuelle parfaite. Comme avant ! Avec le Cialis, mon copain. Un cachet tous les matins en 5mg.

Je pense que je vais pouvoir m’en séparer. Mais pas maintenant !

En ce qui me concerne, le plaisir est le même, voire supérieur.

Le Dr Thoulouzan reste pour moi un médecin exceptionnel. Il a opéré 4 heures, avec cette empathie propre aux grands médecins. Avec cette humilité et cette avarice de mots des gens qui agissent.

Un homme d’une trempe rare, animé d’un idéal, d’une foi dans sa pratique.

Je lui vouerai toute mon existence une admiration sans limites. Son service est à son image, humain, professionnel, avec cette joie communicative dont a tant besoin le malade après une chirurgie.

Merci encore Matthieu. Je suis aussi universitaire, physico-chimiste, et j’aurais tant aimé avoir un ami comme vous lors de mes études.

Opéré le 17/11/2020 à ciel ouvert par Matthieu THOULOUZAN

Ce patient accepte d'être contacté (06 47 60 92 35)